Le Loup devenu Berger
JEAN de LA FONTAINE
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Un Loup qui commençait d'avoir petite part Aux Brebis de son voisinage,
Crut qu'il fallait s'aider de la peau du Renard Et faire un nouveau
personnage. Il s'habille en Berger, endosse un hoqueton, Fait sa
houlette d'un bâton, Sans oublier la Cornemuse. Pour pousser jusqu'au
bout la ruse, Il aurait volontiers écrit sur son chapeau : C'est moi qui
suis Guillot, berger de ce troupeau. Sa personne étant ainsi faite Et
ses pieds de devant posés sur sa houlette, Guillot le sycophante approche
doucement. Guillot le vrai Guillot étendu sur l'herbette, Dormait alors
profondément. Son chien dormait aussi, comme aussi sa musette. La
plupart des Brebis dormaient pareillement. L'hypocrite les laissa faire,
Et pour pouvoir mener vers son fort les Brebis Il voulut ajouter la
parole aux habits, Chose qu'il croyait nécessaire. Mais cela gâta son
affaire, Il ne put du Pasteur contrefaire la voix. Le ton dont il parla
fit retentir les bois, Et découvrit tout le mystère. Chacun se réveille
à ce son, Les Brebis, le Chien, le Garçon. Le pauvre Loup, dans cet
esclandre, Empêché par son hoqueton, Ne put ni fuir ni se défendre.
Toujours par quelques endroits fourbes se laissent prendre. Quiconque
est Loup agisse en Loup : C'est le plus certain de beaucoup.
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